Conservation, restauration de peintures murales et bois polychromes:

Fresques, mezzo fresco, détrempe, huile, sur supports d'enduit, de pierre, de toile, de bois...
Plafonds à la française, décors de boiseries, sculptures monumentales et mobilier liturgique...
Méthodologie de "restauration timide":
-respectueuse de l'oeuvre, sans résines ni produits écotoxiques
-produits naturels et aucune interprétation
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Bonjour chers visiteurs! J'ai créé ce blog afin de partager avec vous mon métier-passion.
Le Patrimoine, l'architecture, les objets qui nous entourent font partie de notre Histoire, que ce soit l'histoire de notre beau pays, ou une petite histoire qui a marqué une région, un village, l'un de nos ancêtres, et nous touche des années après...
Je me consacre coeur et âme à la sauvegarde de ce Patrimoine.
Conserver, restaurer, c'est soigner, préserver...
Et aimer, respecter.


jeudi 24 février 2011

Une petite histoire de la peinture...

Dans les cavernes de l'époque paléolithique, on voit apparaître les premières peintures. Le support est préalablement humidifié afin que les pigments puissent plus facilement imprégner la roche. La palette de couleur est réduite : ocre jaune, ocre rouge (terres naturelles) et charbon de bois (couleur déjà "synthétique" car faisant appel à une manipulation). Ces pigments, très solides, sont encore utilisés de nos jours.
L'application se faisait avec les mains, un bâton, mais aussi avec un pistolet à peinture! (Des morceaux d'os creux et effilés dont l'intérieur était rempli de pigment liquéfié, retrouvés près des décors, laissent penser que l’on s’en servait pour projeter le colorant en soufflant). 
La fresque naît en Mésopotamie vers 1800 av. J.C. après la création des premiers fours à chaux.
Les asiatiques, les grecs et les romains développent la technique, qui consiste à appliquer un pigment pur (principalement des terres) dans l'enduit de chaux encore frais,  créant en séchant  une réaction appelée carbonatation qui emprisonne le pigment, le rendant quasi inaltérable. Les fresques de Pompéï  en prouvent d'ailleurs la pérennité.  
Le moyen âge en Occident va être fortement marqué par cette technique, puis par la technique "mezzo fresco" consistant à réhausser la fresque après séchage de lignes de couleurs mêlées à un lait de chaux, réhauts extrêmement  fragiles car non liés.


Dans l'Egypte ancienne, la découverte des liants, mélangés aux pigments naturels, assure à la peinture une meilleure tenue.
Les premiers liants connus sont le jus de figue et le miel.
Les enduits de support à base d'un mélange de boue, de bouse de vache, de poil d'animal ou de paille hachée et de plâtre étaient ensuite décorés avec cette nouvelle technique. 
Ce sont les prémices de la  tempera, principale technique de peinture d'art utilisée depuis ces temps immémoriaux, puis par les peintres d'icônes byzantines, enfin en Europe durant le Moyen Âge.
De nouveaux pigments apparaissent : rouge de cinabre, bleu outremer, bleu égyptien, rejoints, plus tard, par la céruse et le minium de plomb. Des colorants extraits du règne animal ou végétal comme le carmin de Kermès et le pastel sont également utilisés. 
Les enduits deviennent d'une très grande solidité (mélange de chaux éteinte, de craie et de poussière de marbre). 
Il faut ensuite attendre le plein Moyen Age pour voir apparaître un nouveau liant: le blanc d'œuf. De nombreux artistes du Moyen Age et de la Renaissance ont utilisé ce liant qui a d'excellentes qualités de conservation et n'altère pas la fraîcheur des pigments. Puis la détrempe (tempera), à l'oeuf, à la colle de peau,...  prend le dessus sur la fresque et devient la technique de peinture murale par excellence.


Quand la peinture à l'huile fut découverte en Europe vers la fin du Moyen Âge, la détrempe continua encore à être employée pendant un certain temps en tant que sous-couche recouverte par un décor à l'huile coloré translucide ou transparent. Cette technique transitoire mixte fut suivie par une technique de peinture à l'huile pure, qui remplaça presque totalement la tempera au XVIème siècle.
Les toutes premières peintures à l'huile ont été récemment découvertes (2001) en Afghanistan et dateraient du VIIème siècle, préparée à base d'huile de noix ou de graines de pavot desséchées...
Sous la Renaissance l'huile de lin commence à être utilisée par les peintres de chevalet, car elle est plus facile d'emploi et s'applique sur des supports moins bien préparés. 
C'est dans le bouillonnement social de la Renaissance, que la profession de peintre-décorateur va s'organiser.
Elle présente la particularité d'associer l'aspect artistique à celui plus matériel de l'artisan. 
Le support plâtre devient aussi de plus en plus présent, bien que moins résistant, notamment à l'humidité...


En 1720 Charles Laclef, dont l'entreprise deviendra plus tard la Maison Lefranc, s'installe à Paris et entreprend pour la première fois en Europe la fabrication de peintures. 
On peut considérer cette date comme marquant le passage de la préparation des couleurs par les peintres à leur fabrication par des techniciens chimistes. 
Le pigment blanc est l'oxyde de zinc, le lithopone n'apparaîtra que vers 1850. Le dioxyde de titane vers 1920. Il permet aux peintures blanches d’atteindre de grandes performances de couvrant. 
Le pigment noir principal est le noir de fumée, suivi de l'oxyde de fer noir naturel. 
Existent également des noirs végétaux : noir de vigne, noir de fusain (encore utilisé de nos jours dans le dessin), et des noirs animaux : noirs d'os, noir d'ivoire. 
Les pigments de couleur sont principalement les terres : terre de sienne, terre d'ombre, ocre rouge, ocre jaune ou des pigments synthétiques comme : le bleu de Prusse (bleu milori), le bleu d'outremer, le vermillon de mercure, le violet de manganèse...
Les liants, à cette époque, sont les gommes copal qui sont des substances fossiles, provenant de végétaux disparus de la surface du globe. 

Vers 1850, naissent aux Etats-Unis les premières peintures cellulosiques. 
Cette peinture à séchage rapide, restée sans emploi pendant 50 ans, devient une nécessité au début du XXe siècle avec le développement de l’industrie automobile. 
C'est surtout entre les deux guerres mondiales, avec l'arrivée de la pétrochimie, que l'on constate l'extraordinaire éclosion de matières nouvelles : résines glycérophtaliques, vinyliques, silicones, acryliques, polyuréthanes, époxydiques…. Elles apportent de nouvelles qualités de séchage, de brillant, de résistance… 
Les pigments naturels comme les ocres tendent à disparaître pour être remplacés par des oxydes de fer synthétiques qui présentent l'avantage d'être plus fins et donc d'aider à obtenir plus de finesse dans la  peinture, bien que moins stables...
Dès lors les pigments de couleur sont  quasiment tous synthétiques. 


Avec ces techniques nouvelles, l'art moderne et contemporain marquent une évolution de la peinture, qui est passée d'un rôle traditionnellement historique et documentaire, à celui de concept.


mardi 15 février 2011

Etude préliminaire

Voici quelques clichés d'une étude que je viens de réaliser sur un tabernacle doré et polychrome du XVIIème siècle, pour vous expliquer mon travail en amont d'une conservation-restauration.

Le tabernacle: bronzine sur la façade et détrempe grise sur les côtés.

Essai "in situ" de dégagement chimique de la bronzine. 

Apparaît un décor de faux-marbre vert assez grossier, probablement du XIXème.

Sous le marbre vert peint à l'huile il me semble deviner des traces de décor ocre et ocre rouge, très certainement la polychromie d'origine.
Je décide d'emporter le tabernacle à l'atelier pour approfondir les sondages.

Un sondage mécanique découvre effectivement une détrempe en bon état.

J'effectue un second sondage sur la colonne afin de déterminer l'état de conservation de la détrempe.

Un autre faux-marbre: bien que légèrement écaillée, la polychromie est relativement solide.

Sur la façade, le dégagement laisse apparaître une belle dorure sur une assiette rouge.

Sur la porte, le sondage dévoile la dorure d'origine avec rehauts de détrempe ocre rouge.

La dorure d'origine, en bon état de conservation, apparaît sur les côtés du tabernacle.

Plusieurs petites pièces d'ébénisterie ont disparu, notamment des moulures.

Le protocole de restauration envisagé est un dégagement des repeints et de la bronzine, un nettoyage minutieux intérieur et extérieur du tabernacle, une consolidation et fixation de la polychromie des colonnes et de la dorure du tabernacle, la restitution des petites menuiseries en ébénisterie, puis la retouche picturale et restauration des zones lacunaires de dorure à la feuille et à l'or coquille.

J'espère encore aujourd'hui vous avoir éclairé sur ma démarche et mon métier, à bientôt!